Durant des milliers d’années, nos ancêtres ont utilisé des satellites pour s’orienter à travers le globe. Cependant, jusqu’au milieu du XXe siècle, ces satellites n’étaient pas artificiels, comme ceux du GPS : il s’agissait d’étoiles. En réalité, le Soleil et les étoiles ne sont pas des satellites de la Terre, mais la navigation astronomique se base sur une perception du monde précopernicienne (on croyait alors que la Terre était au centre de l’univers).
Même si cela peut paraître obsolète, ce système a pourtant été perfectionné à tel point que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, il était aussi précis qu’un GPS moderne. De plus, ce système était beaucoup plus fiable.
Si les satellites GPS devenaient inutilisables, l’humanité serait reléguée, non pas au XVIIIe siècle, mais à l’Antiquité.
La navigation par satellite a de plus en plus d’importance. En tout juste 10 ans, les appareils de navigation guidés par GPS sont devenus indispensables dans les automobiles, et la technologie conquiert désormais les téléphones portables. Les satellites remplacent également la technologie radar pour la navigation des navires, trains, avions, navettes spatiales, sous-marins, chars d’assaut et (la raison pour laquelle le système a été mis au point à l’origine) des bombes.
Même si la navigation par satellite semble cruciale aujourd’hui, les 30 satellites GPS contrôlés par les États-Unis n’ont été mis en orbite qu’entre 1989 et 1994. La Russie possède également son propre système de navigation (désormais obsolète) et la Chine a proposé des plans de développement pour le système Beidou, qui reste pour le moment assez limité. Depuis quelques années, l’Europe essaie de rassembler suffisamment de fonds pour la construction de son propre système, Galileo.
Jusqu’en 2000, le signal GPS a délibérément été réduit à une précision de 100 mètres par le département américain de la Défense. Depuis, le système commercial a une précision de 10 à 30 mètres horizontalement et 20 à 60 mètres verticalement. Les forces militaires des États-Unis disposent à présent d’un niveau de précision de moins de 3 mètres, qui peut être affiné jusqu’à moins d’un centimètre, grâce à d’autres techniques.
Savoir-faire
Le système GPS renseigne immédiatement les coordonnées de ses utilisateurs : en degré de longitude (la position relative au méridien de Greenwich), en degré de latitude (la position relative à l’Équateur) et en altitude (la position relative au niveau de la mer).
Pour le dire franchement : à présent, même un idiot peut connaître sa position sur Terre en appuyant sur un bouton. Il y a plusieurs siècles, il était possible de connaître sa position sur Terre presque aussi précisément qu’avec le GPS, mais cela nécessitait du temps, du savoir-faire et était beaucoup plus compliqué.
L’histoire de la navigation
L’Homme a exploré le monde avant le GPS. Des voyages en navire ont été entrepris des milliers d’années avant notre ère. Sur terre, l’humanité a commencé à voyager bien avant. Sur la terre ferme, il est assez simple de s’orienter. Un paysage peut avoir plusieurs points de repère, comme des chaînes de montagnes ou des rivières, qu’il est possible de mémoriser. En mer (ou dans le désert) il est plus difficile de trouver de tels points de repère.
Polynésiens
Les premiers navigateurs restèrent près des côtes et se déplaçaient d’île en île. Progressivement, ils ont appris à utiliser des indices météorologiques, comme les nuages, courants, vents et vagues. Bien avant les navigateurs européens plus connus, les Polynésiens avaient traversé des milliers de kilomètres de cette façon. Ces connaissances étaient combinées à des techniques primitives de navigation reposant sur les mouvements du Soleil et des autres étoiles. Au fur et à mesure, plus d’informations de navigation furent transmises aux générations futures, d’abord oralement, puis sous forme de cartes.
Il y a plusieurs siècles, il était possible de connaître sa position sur Terre presque aussi précisément qu’avec le GPS, mais cela nécessitait du temps, du savoir-faire et était beaucoup plus compliqué.
La navigation astronomique est mentionnée dans les œuvres de Homer et Hérodote, dans la Bible et la mythologie nordique. Une telle histoire en fait l’une des technologies les plus brillantes que l’humanité ait jamais inventées. La navigation astronomique a été perfectionnée avec le début des voyages d’exploration européens, et fut la base de tous les voyages en mer et dans le ciel jusqu’au milieu du 20ième siècle. Elle était aussi utilisée sur terre, dans une moindre mesure. Seulement après la Seconde Guerre mondiale, elle a été remplacée par la radio et ensuite par la navigation par radar. Les systèmes de radionavigation ont été démantelés à la fin du 20ième siècle, la navigation par radar est progressivement remplacée par la navigation par satellite.
Comètes
Pour déterminer sa position sur Terre, il faut pouvoir trouver le degré de longitude (est-ouest) ainsi que le degré de latitude (nord-sud).
La latitude (la distance aux Pôles ou à l’Équateur) a été assez simple à déterminer depuis l’Antiquité, en mesurant l’angle du Soleil par rapport à l’horizon. Les autres étoiles ont également pu être utilisées de cette manière, comme l’étoile polaire de l’hémisphère nord.
À travers l’Histoire, différents instruments ont été mis au point pour les comètes, des outils qui sont devenus de plus en plus précis et pratiques : l’astrolabe (depuis le 4ième siècle), le quadrant (depuis le 13ième siècle), le bâton de Jacob (17ième siècle), l’octant et le sextant (au 18ième siècle). Le sextant a une précision de 100 à 200 mètres, selon la qualité de l’instrument et l’expérience de l’utilisateur. Il est tout aussi précis que le réseau GPS commercial en 2000.
Les sextants étaient aussi développés pour une utilisation sur terre, sous l’eau (dans les sous-marins), et dans les airs (les montgolfières, puis les avions et même lors du premier vol spatial). Une personne utilisant un sextant sur terre ou dans les airs devait prendre comme repère un horizon artificiel.
## Où sommes-nous ?
Déterminer son degré de longitude (est ou ouest) a toujours été plus difficile. Pour obtenir cette information, il faut savoir la date et l’endroit où l’on a commencé son voyage. Aujourd’hui, on peut le savoir assez facilement en ajustant son horloge sur le méridien de Greenwich (ou une autre position) puis en comparent cette heure avec l’heure locale en mer.
Le Soleil tourne autour de la Terre en 24 heures (en réalité, c’est l’inverse, comme mentionné plus haut), ce qui signifie qu’il se déplace de 15 degrés par heure (360 divisé par 24). Si l’heure sur le navire est 3 heures plus tard que l’heure de Greenwich (ou un autre point), on se retrouve 45 degrés plus à l’ouest que le point de départ.
Le problème était que les chronomètres de marine précis étaient seulement disponibles à partir de la seconde moitié du 18ième siècle. Avant cette date, il était impossible pour les marins de savoir combien de temps ils avaient passé en mer depuis leur départ. Les horloges terrestres étaient très imprécises sur les navires, à cause des mouvements, de l’humidité et des changements de climat.
C’est pour cette raison que les marins ont utilisé le concept de « navigation à l’estime ». Grâce à un compas qui donnait la direction (utilisé par le monde occidental depuis le 18ième siècle) et un loch qui était utilisé pour calculer la vitesse du navire, ils en déduisaient leur trajectoire et la distance parcourue depuis leur départ, et pouvaient ensuite calculer la durée de leur trajet.
Loch
Le calcul de la vitesse du navire était effectué en jetant un objet dans l’eau à la proue du navire, puis en comptant le temps qu’il fallait pour que l’objet (le plus souvent une poutre attachée à une corde) passe la poupe du navire.
Le compas et le loch permettaient également de déterminer le degré de latitude quand le ciel étoilé était couvert par d’épais nuages, le plus grand inconvénient de la navigation astronomique.
L’invention du chronomètre de marine vers 1760 était ce qui manquait au système de navigation.
Les courants, le vent et des erreurs mineures dans les mesures pouvaient mener à de larges déviations sur de longues distances, ce qui menait au naufrage de nombreux navires. La navigation à l’estime devenait beaucoup plus simple si l’on prenait un point de repère, comme une île, qui pouvait servir de point de départ pour le trajet en cours.
Pour déterminer le degré de longitude, une autre solution était de calculer en utilisant un calendrier lunaire, une méthode inventée par des astronomes avant l’arrivée des chronomètres de marine. Ces calculs nécessitaient plusieurs heures, ce qui voulait dire que les informations obtenues étaient obsolètes.
## Phares, bouées, bateaux-feux et cornes de brume
L’invention du chronomètre de marine vers 1760 était ce qui manquait au système de navigation. Il était à présent possible de déterminer précisément le degré de longitude, et des cartes précises pouvaient être dessinées, qui à leur tour apportaient une aide supplémentaire à la navigation en temps couvert.
De plus, un réseau de phares, de bouées et de bateaux-feux avait été établi, indiquant les dangers que représentent les bancs de sable et les rochers. Les premiers phares ont été construits il y a plus de 2 000 ans, mais grâce à l’invention des lampes qui remplacèrent le feu à la fin du 18ième siècle, ils devinrent plus efficaces et plus simples à faire fonctionner. Les bateaux utilisaient également des gongs, des cloches et des explosifs pour prévenir les autres bateaux dans le brouillard. Au milieu du 19ième siècle, ces techniques furent remplacées par les cornes de brume.
À la fin du 19ième siècle, la navigation maritime avait donc évolué, comprenant un système fiable qui associait le savoir-faire d’astronomes, mathématiciens, cartographes et inventeurs. Avec l’arrivée de la radionavigation et plus tard, de la navigation par radar et par satellite, le système entier a cependant été rapidement démantelé. Les phares et les bateaux-feux ont été abandonnés, et seuls les plus vieux capitaines ou les puritains utilisaient un sextant (qui sont, heureusement, toujours vendus).
## Un système fiable
Il est tout de même important de préserver ces connaissances. Le GPS a permis une navigation plus précise, plus rapide et plus facilement accessible. Cependant, contrairement à la navigation astronomique, ce n’est pas un système infaillible, car il est vulnérable. La navigation astronomique n’est contrôlée par personne, et elle ne peut pas être détruite.
La technologie radar (voir l’image ci-dessus) est plus vulnérable que la navigation astronomique, mais elle est bien plus fiable que le GPS puisqu’il s’agit d’un système décentralisé. Le progrès a un prix.
Se reposer sur un seul système centralisé pour toute navigation représente un grand danger. > Si les satellites GPS devenaient inutilisables, par sabotage ou par accident, tous les bateaux, avions, voitures, sous-marins, randonneurs et bombes de précision seraient complètement perdus. Le domaine de la navigation serait relégué, non pas au 18ième siècle, mais à l’Antiquité.
Liens :
- Le site de Peter Ifland contient de belles images de sextants
- Celestial Navigation Net fournit un grand nombre d’informations pratiques
- Atlas Coelestis possède une collection impressionnante d’anciennes cartes astronomiques