L’installation classique d’un système de production d’électricité par des panneaux solaires photovoltaïques nécessite d’avoir accès à un toit privé et à un gros budget. Ne serait-il cependant pas possible de contourner ces obstacles en installant de petits panneaux solaires, connectés à un réseau de distribution basse tension en courant continu (CC), sur des rebords de fenêtres ou sur des balcons ? Pour mettre cette théorie à l’épreuve, j’ai décidé d’alimenter en énergie solaire le siège social de Low-tech Magazine en Espagne et d’écrire mes articles hors réseau.
Bien que les panneaux solaires soient de moins en moins chers et de plus en plus efficaces, on est loin d’une utilisation massive, même dans les régions les plus ensoleillées. Une des raisons à cela est le coût d’une installation solaire photovoltaïque classique qui dépasse bien souvent le budget de la plupart des foyers. Le prix moyen d’un système photovoltaïque résidentiel de 5kW en 2014, variait de 11 000 $ en Allemagne à 16 450 $ aux Etats-Unis, 12 dont environ la moitié concerne les coûts d’installation. 3
Un second obstacle à l’accès à l’énergie solaire est que tout le monde ne vit pas dans une maison individuelle avec accès à un toit privé. Ceux qui vivent en appartement ont peu de chance de récolter l’énergie solaire avec un système conventionnel installé sur le toit. De plus, les surfaces de toit des immeubles d’habitations deviendraient rapidement trop petites pour couvrir la totalité de la consommation d’électricité des résidents, un problème qui ne fait qu’augmenter à mesure qu’il y a d’étages dans l’immeuble. Et enfin, une installation solaire classique est problématique dès lors que vous êtes locataire, que ce soit d’une maison ou d’un appartement.
Je fais moi même partie de ces personnes qui doivent faire face à chacun de ces obstacles : je vis dans un appartement, je suis locataire et je n’ai pas le budget nécessaire pour un système solaire conventionnel. Cependant, mon appartement est très ensoleillé. Il est situé près de Barcelone en Espagne, une ville dont le taux d’ensoleillement est de près de 1 700 kWh / m2 / an (ce qui est également le taux moyen aux États-Unis). De plus, mon appartement de 60 m2 a un balcon et toutes les fenêtres, orientées sud-sud-ouest, ne reçoivent aucune ombre portée d’arbres ou d’autres bâtiments.
Ces conditions me permettent de passer l’hiver sans système de chauffage, en ne comptant que sur la chaleur solaire et des sous-vêtements thermiques. L’eau chaude est fournie par une chaudière solaire installée par le propriétaire et mon linge sèche sur le balcon. C’est alors en bricolant des panneaux solaires pour un projet artistique que j’ai eu une idée : avec le soleil qui alimente déjà une grande partie de mon espace de vie, ne serait-il également pas possible de récupérer l’énergie solaire des rebords de fenêtres et du balcon pour finalement sortir mon appartement du réseau électrique ? Une telle installation pourrait me permettre de contourner les obstacles d’une installation classique :
- Je n’aurais pas besoin d’un accès au toit.
- Je pourrais installer le système moi-même, ce qui le rend bien moins coûteux.
- Je pourrais prendre l’installation solaire avec moi si je déménage.
De toute évidence, la grande question est de savoir si un tel système solaire non conventionnel pourrait générer assez d’électricité. Comme première expérience, j’ai décidé d’alimenter mon bureau de 10 m2 avec des panneaux solaires placés sur le long rebord de 2,8 m qui longe les fenêtres du bureau et de la chambre adjacente.
Bureau à domicile à énergie solaire
La fenêtre de mon bureau est relativement petite (d’une surface de 1,5 m2, elle ne prend que la moitié d’un mur). Néanmoins, il n’y a pas besoin d’alimentation électrique dans la chambre, qui est éclairée par trois lampes IKEA SUNNAN depuis des années. Par conséquent, la totalité du rebord des fenêtres est disponible pour alimenter en électricité le bureau. Il offre suffisamment d’espace pour cinq panneaux solaires de 10 W chacun, me fournissant chacun 50 watts-crête d’énergie solaire. Le balcon, quant à lui, servira à alimenter le reste de l’appartement. Les détails de ce deuxième projet sont décrits à la fin de cet article.
De par leur emplacement sur le rebord de la fenêtre, les panneaux solaires sont dans l’ombre le matin. Ils reçoivent une lumière directe de 10h à 17h dans le creux de l’hiver (soit un total de 7 heures), et de 13h à 21h en plein été (soit un total de 8h). Le maximum de la production d’énergie est d’environ 400 Wh par jour.
Les panneaux solaires sont connectés en parrallèle et couplés à un contrôleur de charge solaire et à des batteries au plomb de 550 Wh. En supposant une profondeur de décharge de 33% et une efficacité énergétique aller-retour de 80%, cela me donne un stockage d’énergie maximal d’environ 150 Wh.
Est-il possible d’alimenter un bureau avec des panneaux solaires photovoltaïques de 50 watts-crête et 150 Wh de stockage d’énergie ?
Observons maintenant la consommation d’énergie de mon bureau avant qu’il ne soit alimenté par l’énergie solaire. Je suis assis devant mon bureau à travailler la plupart du temps, soit à faire des recherches, soit à écrire, soit à construire ou à réparer des trucs. Les appareils qui nécessitent régulièrement de l’électricité sont :
- Un ordinateur portable, qui a besoin de 20 W de puissance en moyenne.
- Un écran externe d’ordinateur, qui a besoin de 16,5 W de puissance.
- Deux lampes CFL (20 W et 12 W) et une lampe LED (3 W).
Consommation d’énergie d’un bureau
Cela demande donc jusqu’à 35 W de puissance pendant la journée (avec uniquement l’ordinateur portable et l’écran en cours d’utilisation) et 70 W après le coucher du soleil (l’ordinateur portable, l’écran et les lumières). Je travaille habituellement le matin et le soir, approximativement de 10h à 14h et de 20h à 1h. L’après-midi, je fais autre chose, ou je vais travailler à la bibliothèque.
La consommation totale d’électricité de mon bureau est donc de 500 Wh par jour (en moyenne), avec une légère variation entre l’hiver et l’été. Les jours nuageux, j’allume la lumière le matin, ce qui peut augmenter la consommation d’énergie à 640 Wh par jour. De plus, certains de ces appareils ont parfois besoin d’énergie supplémentaire :
- Une imprimante laser, qui consomme 4 Wh d’énergie pour s’allumer et imprimer 8 pages de texte. Ce qui équivaut à faire fonctionner ma lampe de bureau (5 W) pendant plus de 45 min.
- Une paire d’enceintes PC (1,5 W de puissance).
- Trois lampes de vélo USB (chacune utilise 1,4 W de puissance pendant la charge).
- Un appareil photo numérique, qui utilise 3 W pendant la charge.
- Un ventilateur, qui utilise 30 à 40 W d’énergie.
- Un téléphone portable (pas un smartphone) qu’il faut recharger toutes les 2 ou 3 semaines.
Il est clair que mon système de panneaux solaires photovoltaïques ne produit pas assez d’énergie pour la consommation totale de mon bureau. Alors que ma consommation quotidienne d’électricité est d’au moins 500 Wh lors d’une journée de travail de 9 heures, les panneaux installés sur le rebord des fenêtres ne me donnent qu’un maximum de 400 Wh par jour. Par temps couvert, la production d’énergie peut n’être que de 40 à 200 Wh par jour, en fonction de la couverture nuageuse. De plus, le stockage d’énergie n’est que de 150 Wh dans des circonstances idéales, alors que la majeure partie de la consommation d’énergie se fait après le coucher du soleil.
Et pourtant, je suis ici, en train d’écrire cet article, sur un ordinateur portable alimenté par de l’énergie solaire dans une pièce éclairée par de l’énergie solaire. Comment est-ce possible ? En appliquant ces stratégies :
- Maximiser la production d’énergie en donnant le bon angle d’inclinaison aux panneaux selon la saison. 2. Minimiser la consommation d’énergie en installant un réseau en courant continu basse tension et en utilisant des appareils en courant continu. 3. Se forcer à réduire sa demande en énergie les jours sans soleil en se déconnectant du réseau.
Nous examinons ces points plus en détail ci-dessous. Mon système d’énergie solaire fonctionne depuis novembre 2015, avec seulement deux panneaux solaires de 10 W chacun. Puis, trois autres panneaux ont été ajoutés au printemps dernier.
1. Adapter l’inclinaison des panneaux solaires.
Les panneaux solaires installés sur le toit ont généralement un angle fixe d’inclinaison. Parce que la hauteur du soleil varie tout au long de l’année, un angle fixe est toujours un compromis. Les panneaux posés horizontalement sur un toit plat sont relativement bien positionnés pour la production en été, mais beaucoup moins pour celle de l’hiver. En revanche, les panneaux solaires inclinés fonctionnent beaucoup mieux en hiver mais moins bien en été. Sur les toits en pente, l’angle des panneaux solaires est souvent déterminé par la pente du toit, qui n’est pas nécessairement la meilleure inclinaison pour la production d’énergie solaire.
Un panneau solaire photovoltaïque incliné de manière optimale en hiver peut tripler sa production d’électricité par rapport à un panneau placé horizontalement.
Ajuster l’angle d’inclinaison d’un panneau solaire en fonction de la saison peut augmenter considérablement sa production d’électricité en hiver. En décembre, un panneau solaire photovoltaïque à Barcelone qui est incliné de manière optimale vers le soleil d’hiver peut tripler sa production d’électricité par rapport à un panneau placé horizontalement. Parce que l’avantage est beaucoup plus faible au cours des autres saisons, l’augmentation annuelle moyenne de la production d’électricité est inférieure à 10%. Cependant, l’inclinaison des panneaux solaire est la clé pour récolter suffisamment d’énergie pendant les mois d’hiver, lorsque les pénuries d’électricité sont les plus probables.
Dans le cas d’un système de panneaux solaires photovoltaïques installés sur un balcon ou un rebord de fenêtre, régler l’inclinaison de ses panneaux devient donc aussi facile que d’arroser ses plantes. Bien que vous puissiez avoir envie de faire de petits ajustements toutes les heures, tous les jours ou tous les mois, adapter l’angle deux à quatre fois par an est largement suffisant.
Il y a un autre avantage à avoir ses panneaux solaires si proches et accessibles : Ils peuvent être nettoyés régulièrement. Les panneaux installés sur les toits sont rarement nettoyés car ils sont la plupart du temps difficilement accessibles. Les pertes dûes aux poussières et aux saletés sont supposées être de 1% de l’énergie produite, mais dans les régions sèches et poussiéreuses, tout comme dans les zones à fort trafic, elles peuvent montées jusqu’à 4 à 6 % si le nettoyage n’est pas régulier. 4
Régler l’inclinaison de ses panneaux solaires est aussi facile que d’arroser ses plantes
De toute évidence, il est important que les panneaux ne tombent pas du rebord de la fenêtre. Les rebords de fenêtre diffèrent en forme et en taille, ce qui nécessite de dessiner une structure porteuse sur-mesure. J’ai une rambarde fixe en métal sur le rebord de ma fenêtre, destinée à protéger les pots de fleurs et jardinières, ce qui me permet de sécuriser la fixation de mes panneaux solaires. J’ai de la chance d’avoir cette fixation possible, cela montre bien comment de petits changements de conception peuvent faire la différence. Comme sécurité supplémentaire, j’ai lesté la base en bois de chaque panneau avec de lourdes pierres.
L’ajout d’un mécanisme pour varier l’inclinaison des panneaux complique la conception, parce que la partie mobile doit être aussi solide que la base. Après plusieurs tentatives infructueuses, j’ai trouvé un mécanisme qui semble fonctionner, avec des barres de Meccano vintage (2-3 tiges superposées, des écrous et des boulons plus gros). Une barre est reliée à la base de la structure, tandis qu’une autre est reliée à la planche de bois qui porte le panneau. Les deux barres sont reliées l’une à l’autre au milieu. Desserrer cet assemblage me permet d’ajuster la longueur des supports et donc l’angle des panneaux solaires.
Fenêtres solaires photovoltaïques?
Certains d’entre vous considèreront peut-être mon approche comme étant presque déjà obsolète, parce que certaines compagnies sont en train de travailler sur des fenêtres solaires photovoltaïques : un verre qui se double d’un générateur d’électricité. Cependant, cette technologie ne devrait pas être aussi performante que des panneaux solaires inclinables positionnés sur un rebord de fenêtre, et cela pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, les fenêtres solaires photovoltaïques sont le plus souvent entièrement verticales, ce qui n’est jamais un angle efficace pour générer de l’énergie solaire – leur production d’énergie est environ trois fois plus basse que pour des panneaux horizontaux. 5 Deuxièmement, en été, ce système rend impossible l’ouverture des fenêtres ou l’occultation par des stores, ce qui entrainerait rapidement une surchauffe de mon bureau et créerait donc un besoin d’ajouter de l’air conditionné.
Mon installation de panneaux solaires, quant à elle, peut toujours produire de l’énergie quand les stores sont fermés ou quand les fenêtres sont ouvertes. Pour finir, un dernier argument et non des moindre, un panneau solaire intégré à une fenêtre ne peut pas être retiré quand on déménage, alors que mon système, lui, est entièrement démontable.
2. Opter pour un système en courant continu basse tension
Les systèmes classiques de panneaux solaires photovoltaïques convertissent le courant continu (CC) produit par les panneaux solaires en courant alternatif (CA) dans le but de le rendre compatible avec le courant alternatif du système de distribution des bâtiments. Puisque de nombreux appareils modernes fonctionnent en interne sur CC, le CA produit est ensuite de nouveau converti en CC. La conversion du CA en CC est réalisée par un onduleur, qui se trouve entre le contrôleur de charge et la charge. La seconde conversion se produit dans l’adaptateur CA / CC (externe ou interne) des appareils utilisés.
Le problème avec cette double conversion d’énergie c’est qu’elle génère des pertes substantielles d’énergie. C’est particulièrement vrai dans le cas des appareils à semi-conducteurs comme les LED et les ordinateurs, où les pertes combinées de la conversion CC / CA / CC s’élèvent à environ 30% - voir notre article précédent pour plus de détails. Parce que ce sont également les appareils qui constituent la majeure partie de la consommation d’énergie dans mon bureau, il est logique d’essayer d’éviter ces pertes en construisant un système basse tension en courant continu.
Comme dans un bateau ou dans un camping-car, le courant continu 12 V de mes panneaux solaires est directement utilisé par mes appareils en courant continu 12 V, ou stocké dans des batteries en courant continu 12 V. Si mes panneaux solaires génèrent leur puissance maximale de 50 W, mes appareils ont 50 W disponibles. Lorsque la batterie est impliquée, la charge et la décharge de la batterie ajoutent 20% de perte d’énergie, ce qui laisse 40 W de disponibles pour les appareils.
Le choix d’un système en courant continu basse tension augmente l’efficacité énergétique de 40%
D’autre part, dans une installation solaire photovoltaïque classique où une conversion CC / CA / CC a lieu, les appareils ne disposeraient alors que de 35 W et le reste serait perdu sous forme de chaleur lors de la conversion d’énergie. Si un accumulateur au plomb est utilisé dans un tel système, il ne resterait alors que 28 W de puissance. Pour résumer, dans mon cas spécifique, le choix d’un système en courant continu multiplie par 1,4 la production d’énergie.
Le choix d’un système en courant continu ne permet pas seulement d’économiser de l’énergie, mais aussi de la place et de l’argent. Moins de panneaux solaires sont nécessaires et il n’y a pas besoin d’acheter un onduleur CC / CA, qui est un appareil coûteux et qui doit être remplacé au moins une fois pendant la vie d’un système de production d’énergie solaire. Mais le plus important dans tout ça, c’est que vous pouvez construire vous même un système d’énergie solaire CC, même si vous êtes aussi maladroit que moi. Un réseau en courant continu basse tension (jusqu’à 24 V) n’est pas dangereux à manipuler car il ne comporte aucun risque de choc électrique. 6 En additionnant tous les coûts, j’ai sorti mon appartement du réseau pour moins de 400 euros.
Où trouver des appareils en courant continu
Le montage d’un système en courant continu implique d’utiliser des appareils compatibles. Cependant, comme de très nombreux appareils fonctionnent déjà en interne en CC, cela ne signifie pas que vous devrez tout racheter. Pour adapter l’éclairage de mon bureau, j’ai simplement coupé les fiches d’alimentation des cordons d’alimentation, je les ai remplacées par des fiches compatibles CC qui s’insèrent directement dans mon contrôleur de charge solaire et j’ai remplacé les ampoules par des ampoules LED de 12 V. Pour faire fonctionner l’ordinateur portable sur CC, j’ai remplacé l’adaptateur secteur par un cordon d’alimentation compatible CC, le même que celui utilisé dans les voitures. Ces cordons d’alimentation existent et peuvent être achetés pour tous les modèles d’ordinateurs qui existent.
Certains autres appareils sont plus difficiles à adapter parce que leurs adaptateurs CA / CC sont directement placés à l’intérieur des appareils. Par exemple, je n’ai pas encore trouvé comment convertir mon écran d’ordinateur externe pour qu’il fonctionne directement sur l’alimentation CC.
Les appareils qui ne peuvent pas être convertis sont généralement disponibles en version CC 12 V, comme par exemple: les réfrigérateurs, les mijoteuses, les compresseurs, ou les outils électriques. Ils peuvent être plus chers que leurs équivalents en CA, car ils sont produits en quantités beaucoup plus petites. Les réfrigérateurs en CC sont beaucoup plus chers parce qu’ils utilisent une isolation sous vide. Bien que cela ait du sens dans un camping-car ou un voilier où l’espace est limité, c’est un coût inutile dans un bâtiment.
La prise allume cigare des voitures, initialement conçu pour alimenter un allume-cigare chauffé électriquement, est devenu de fait depuis des décennies le connecteur en CC standard. Plus récemment, il a été rejoint par un autre système de distribution en CC basse tension: le connecteur USB. Les câbles USB fonctionnent sur 5 V en CC et peuvent transférer à la fois des données et de l’énergie. De nombreux appareils électroniques grand public sont désormais alimentés de cette manière.
Ces appareils sont généralement chargés par le port USB d’un ordinateur portable ou fixe, mais ils peuvent aussi être directement branchés sur un système solaire photovoltaïque. Alors qu’un câble USB standard supporte une puissance maximale de seulement 10 watts, le nouveau modèle USB-Power Delivery peut alimenter des appareils avec une consommation électrique allant jusqu’à 100 watts.
Par temps nuageux
Le choix pour un système en CC a considérablement réduit la consommation d’énergie de mon bureau. La consommation de mon ordinateur portable a diminué d’environ 20%. Opter pour des lampes à LED en CC a réduit de moitié la consommation pour l’éclairage (de 35 à 16 W). Sur la base de la journée de travail de 9h décrite précédemment, la consommation quotidienne des appareils régulièrement utilisés dans mon bureau est passée de 500 à 350 Wh/jour. Cela porte la consommation moyenne en dessous de la production d’énergie lors des jours ensoleillés (400 Wh), qui sont très nombreux là où je vis.
En réalité, l’écran d’ordinateur externe et l’imprimante laser fonctionnent toujours sur le réseau électrique. Les 350 Wh de consommation d’énergie mentionnés ci-dessus incluent l’utilisation hypothétique d’un écran externe en CC (économie de 15% par rapport à une version en CA), mais pas l’utilisation de l’imprimante. Cependant, par temps ensoleillé, un surplus d’électricité assez important est produit, ce qui suggère que je pourrais également faire fonctionner l’écran externe et l’imprimante. Même les jours partiellement nuageux, l’énergie est abondante.
Cependant, la consommation d’énergie reste toujours trop grande pour les jours nuageux où la production se situe entre 40 et 200 Wh. Pour résoudre ce problème, on pourrait bien évidemment ajouter plus de panneaux solaires et de batteries. Cette solution ne semble cependant pas judicieuse car le système deviendrait trop coûteux, moins pratique et donc moins durablement écologique.
Pour garantir une consommation quotidienne de 350 Wh d’électricité pendant trois jours consécutifs sans soleil en décembre (dans le cas du pire scénario de production de seulement 40 Wh par jour), j’aurais besoin de multiplier par quatre la capacité de l’énergie solaire, passant de 50 à 200 W de capacité de pointe, et d’avoir au moins cinq fois plus de batteries.
Bien qu’il soit possible d’installer l’équivalent de 200 W de panneaux solaires sur le rebord des fenêtres, ce serait contre-productif car ils empêcheraient la lumière mais aussi la chaleur solaire d’entrer dans les pièces. Ajouté à cela, beaucoup trop d’électricité serait produite, et donc gâchée, pendant la majeure partie de l’année.
3. Adapter la demande d’énergie à l’offre disponible
Il y a une autre manière de faire correspondre les chiffres s’il n’y a pas assez de soleil disponible : utiliser moins d’énergie. Suggérer une réduction de consommation d’énergie est plutôt controversé, mais il existe pourtant un nombre étonnamment élevé de façons de réduire sa consommation, sans pour autant avoir à revenir à l’âge de pierre. Voici quelques pistes que je pourrais mettre en œuvre dans mon bureau :
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Je pourrais installer un second bureau juste à côté de la fenêtre. De cette manière je pourrais me passer de lumière artificielle lors des jours les plus sombres de l’hiver, ce qui me permettrait de sauver encore au moins 40 Wh lors des jours où la production d’électricité est à son plus bas niveau.
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Je pourrais utiliser moins de lumière pendant les soirées des jours où la production n’a pas été élevée. La majeure partie de l’année, j’ai suffisamment d’énergie disponible pour utiliser toutes les lumières de la pièce. Cependant, la plupart du temps, je me débrouille avec seulement deux lampes, et si nécessaire je pourrais n’utiliser qu’une seule lampe de 5 W ou même de 3 W. Lorsque la production solaire est au plus bas, cette dernière me donne plus de 13 heures de lumière. Je n’aurais donc jamais à passer une nuit dans le noir.
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Je pourrais reporter les charges aux après-midi ensoleillés. Même en hiver, les batteries peuvent déjà être chargées autour de 14 ou 15 heures les jours ensoleillés. L’ajout d’une charge supplémentaire au système pendant ces périodes permet de profiter de cette abondance d’énergie qui serait autrement perdue. C’est à ces moment-là que je peux charger les lumières du vélo, l’appareil photo numérique ou le téléphone, utiliser le fer à souder de 12 V (mon seul outil électrique) ou l’imprimante. En été, je peux utiliser le surplus d’énergie pour alimenter deux petits ventilateurs USB, et c’est bien sûr à cette période où j’en ai le plus besoin.
Il y a une quantité étonnamment élevée de moyens de réduire notre consommation d’énergie sans avoir à revenir à l’âge de pierre
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Je pourrais changer mes horaires de travail. Si je parvenais à travailler de 9h à 18h à la place des matins et des soirées, j’obtiendrais une double économie d’énergie. Premièrement, je n’aurais plus besoin d’éclairage, excepté pour une heure environ en hiver (ce qui économiserait 70 à 80 Wh/jour). Deuxièmement, j’utiliserais le plus d’énergie au moment où elle est produite, évitant 20% de charge et de décharge de la batterie lors de l’utilisation de l’ordinateur portable la nuit et le matin (ce qui économiserait 30 Wh supplémentaires). Changer mes horaires de travail abaisserait la consommation quotidienne d’électricité à environ 125 Wh, soit moins de la moitié de la production d’électricité maximale. De plus, toute la capacité de la batterie serait disponible pour les jours nuageux, car il n’y aurait pas d’utilisation d’énergie la nuit.
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Je pourrais adapter mon type de travail sur ordinateur aux conditions solaires. Il y a une différence remarquable dans la consommation d’énergie de l’ordinateur portable entre faire du traitement de texte (environ 15 W) et surfer sur le Web (environ 25 W). En d’autres termes, je peux presque travailler deux fois plus longtemps lorsque j’écris, ce que je pourrais faire dans les moments où l’énergie disponible est faible.
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Je pourrais abandonner mon écran d’ordinateur externe. Il peut être très pratique pour certains travaux, permettant d’avoir à la fois un écran pour lire et un écran pour écrire, mais la plupart du temps, ce n’est juste qu’une perte d’énergie sans réelle utilité. Abandonner l’écran externe me ferait encore économiser 150 Wh par jour. Cependant, cela augmenterait probablement l’utilisation de l’imprimante, il reste donc encore à voir si cette option économiserait vraiment de l’énergie.
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Pendant plusieurs jours très nuageux consécutifs, je pourrais revenir à des mesures plus drastiques, comme travailler à la bibliothèque ou ne pas travailler du tout. Ou, je pourrais faire un travail qui n’implique aucune consommation d’énergie pendant la journée, comme lire des livres et prendre des notes à la main. Cela apporterait d’autres avantages : cela peut être rafraichissant de se déconnecter un moment et de faire les choses comme avant. Sortir un soir est un moyen amusant et facile de maintenir le niveau d’énergie suffisamment élevé pendant les périodes de mauvais temps.
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Je pourrais construire un générateur à pédale lorsque j’ai vraiment besoin de plus d’électricité pendant les jours nuageux. À strictement parler, il ne s’agit pas d’une réduction de la demande d’énergie, mais cela implique bien sûr un effort de ma part. Pédaler pendant une heure et demie générerait environ 100 Wh d’électricité, ce qui me permettrait de travailler sur l’ordinateur pendant 3 à 5 heures ou d’utiliser la lumière LED 5 W toute la nuit.
En gardant un œil sur mon baromètre et en étant un peu flexible, ce n’est pas si difficile de planifier mon travail en fonction de la météo. Cependant, jusqu’à présent, j’ai réussi à profiter de ces opportunités principalement en ce qui concerne l’éclairage, et moins lors de l’utilisation de l’ordinateur portable. Cela n’a rien à voir avec le fait que l’utilisation de l’ordinateur portable soit moins flexible que l’éclairage. Il s’agit plutôt d’une conséquence de la façon dont le système est construit.
Cela devient clair au regard de la façon dont j’ai mis en place mon expérimentation. Je voulais évidemment tester l’installation en plein hiver avant d’écrire sur le sujet. Cependant, je n’avais que deux panneaux solaires à l’époque. Par conséquent, j’ai d’abord testé mon bureau alimenté à l’énergie solaire en faisant fonctionner l’ordinateur à l’énergie solaire pendant deux semaines (tout en faisant fonctionner les lumières sur le réseau), suivi d’un test de deux semaines en faisant fonctionner l’éclairage sur l’énergie solaire (et l’ordinateur portable sur le réseau).
Pour l’éclairage, il est impossible de revenir en arrière sur le réseau car j’ai dû couper les cordons d’alimentation de toutes les lampes pour les rendre compatibles avec le réseau 12 V en courant continu.
Les résultats étaient remarquablement différents pour les deux périodes. Avec l’ordinateur portable, je pouvais toujours revenir sur le réseau général en changeant simplement le cordon d’alimentation. Par conséquent, rien ne me forçait réellement à adapter ma manière de travailler pour ne consommer que l’énergie disponible les jours sombres. Pour l’éclairage, à l’inverse, il était impossible de revenir en arrière, car j’ai dû couper les cordons d’alimentation de toutes les lampes pour les rendre compatibles avec le réseau 12V en CC, ce qui signifie que je ne pouvais désormais plus les faire marcher sur le CA du réseau.
Pendant les périodes de faible puissance, je n’avais pas d’autre choix que de réduire la demande en énergie pour l’éclairage, et c’est exactement ce que j’ai fait, sans effort je dois dire. J’ai rapidement installé un bureau supplémentaire près de la fenêtre pour éviter d’utiliser les lampes le matin, j’ai éteint les lumières chaque fois que je quittais la pièce, et je ne travaillais qu’avec une ampoule de 5 W ou même de 3 W si nécessaire.
Cinq mois plus tard, je me suis totalement habitué à ajuster les niveaux d’éclairage à l’énergie solaire disponible. D’un autre côté, je continue de brancher mon ordinateur portable sur le réseau si l’énergie est faible. Pourquoi ? Parce c’est possible. 7
Par conséquent, sortir du réseau semble être la clé pour réduire considérablement sa demande en énergie. 8 Le fait d’avoir un approvisionnement limité en énergie encourage également l’utilisation de technologies plus efficaces et économes en énergie. Par exemple, les économies d’énergie que j’ai réalisées en remplaçant les deux lampes CFL restantes par des LED auraient également pu être réalisées sans construire un système photovoltaïque. Cependant, cette option ne m’est venue à l’esprit qu’après avoir décidé de relever le défi d’alimenter le bureau en énergie solaire.
Les progrès sur les technologies plus économes en énergie augmenteront régulièrement les possibilités de mon système hors réseau, sans risque d’effets rebond.
S’il était impossible de repasser sur le réseau général, j’essaierais probablement d’acheter un ordinateur portable plus économe en énergie. 9 À l’avenir, je pourrais également passer aux batteries au lithium-ion, qui ont des pertes plus faibles que les batteries au plomb. Investir dans une technologie plus économe en énergie me permettrait de faire fonctionner l’ordinateur et les lampes plus longtemps avec la même quantité de panneaux solaires. Avec une alimentation électrique limitée, il n’y a aucun risque d’effet rebond qui annulerait ces avantages.
Construire plusieurs systèmes solaires photovoltaïques
Comme mentionné au début de cet article, le bureau à énergie solaire n’est que la première étape vers la conversion totale de l’appartement, en passant tout le système hors réseau. Le deuxième projet consistera à installer un système solaire sur le balcon de 6 mètres de long qui se situe devant le salon et la cuisine (ouverte). Il alimentera les lumières, l’installation stéréo, le routeur Wifi, toutes les utilisations de l’ordinateur en dehors du bureau et tous les appareils de cuisine.
Cette deuxième experience est un défi beaucoup plus grand pour deux raisons. Premièrement, le salon et la cuisine seront également utilisés par la deuxième personne qui vit dans cet appartement, ce qui compliquera la gestion de la consommation d’énergie. De plus, bien que nous n’ayons pas de grille-pain, de cafetière ou de micro-onde, la cuisine abrite un appareil très énergivore : la cuisinière électrique.
Parce qu’il faudrait trop de panneaux solaires et de batteries pour alimenter la cuisinière électrique grâce uniquement à des panneaux solaires photovoltaïques, l’idée est de la remplacer par des alternatives non électriques : un ou deux cuiseurs solaires, une cuisinière sans feu et un « rocket stove » pour le café du matin. En utilisant la chaleur solaire directe, nous pourrions utiliser le balcon nettement plus efficacement. Une autre idée consiste à construire un système low-tech de stockage des aliments qui permettrait de stocker la plupart des aliments à l’extérieur du réfrigérateur, en gardant cet appareil énergivore le plus petit possible ou même en le supprimant complètement.
Le système de panneaux solaires photovoltaïques du balcon sera complètement indépendant de celui du rebord de la fenêtre
Le système de panneaux solaires photovoltaïques du balcon sera complètement indépendant de celui du rebord de la fenêtre. Il y a plusieurs avantages à cette manière de faire. Comme nous l’avons vu dans le précédent article, les pertes liées à la longueur des cables sont relativement élevées dans un système en CC basse tension. Mettre en place plusieurs systèmes indépendants limite grandement la longueur des cables (et leurs encombrements).
Deuxièmement, l’installation de systèmes séparés permet une consommation d’énergie supérieure à 150 watts – ce qui est la limite de sécurité pour un système de 12 V en courant continu. Troisièmement, multiplier les systèmes rend possible le fait de démarrer petit et d’étendre progressivement le système. Cela évite des coûts de lancement trop importants et vous permet de tirer des leçons de vos erreurs.
Apprendre de ses erreurs
C’est en fait une de ces erreurs qui m’a fait me décider à installer deux systèmes distincts, même dans mon relativement petit bureau de 10m2. Les deux panneaux solaires devant le bureau sont connectés à la moitié des batteries (ils alimentent les lumières), tandis que les trois autres panneaux solaires devant la chambre sont connectés à l’autre moitié (ils alimentent l’ordinateur portable).
J’ai en effet court-circuité mon premier régulateur de charge solaire et j’ai dû en acheter un deuxième pendant la réparation du premier. C’était ça ou vivre sans lumière pendant trois semaines. Enfin, un dernier avantage à multiplier les systèmes est une plus grande fiabilité: si un système tombe en panne, il y a toujours de l’électricité disponible quelque part.
Si la deuxième expérience réussit, et bien sûr cela reste à voir, le plan est de résilier notre contrat avec notre fournisseur d’electricité, qui doit être renouvelé en décembre. Évidemment, il serait pratique de garder une connexion au réseau, mais il y a deux raisons importantes de ne pas le faire. La première a été expliquée ci-dessus : le fait de se déconnecter du réseau pousse la créativité et la volonté de réduire la demande d’énergie.
Deuxièmement, l’installation d’un système solaire tout en gardant un raccordement au réseau n’est pas avantageux financièrement, pas en Espagne en tous cas où plus des deux tiers de la facture d’electricité sont constitués de coûts fixes. Ce qui fait que même si nous consommions beaucoup moins d’electricité du réseau, notre facture resterait plus ou moins la même.
Si la deuxième expérience réussit, et bien sûr cela reste à voir, l’objectif est de résilier notre contrat avec notre fournisseur d’électricité
Certains défis restent compliqués à relever, comme l’alimentation de la machine à laver, de la salle de bain ou de l’imprimante laser. Le problème avec la machine à laver et la salle de bain est qu’ils sont du côté nord du bâtiment, loin des panneaux solaires. On pourrait aller dans une laverie mais il n’y en a pas proche de chez nous. On pourrait aussi utiliser une machine à laver à pédales mais elle nécessiterait de l’espace et nous n’en avons pas.
L’imprimante laser peut fonctionner avec un onduleur, ce qui peut également être pratique pour alimenter tout autre appareil occasionnel qui ne fonctionne pas sur une alimentation de 12 V en CC. Cependant, pour cela j’aurais besoin d’un onduleur relativement grand et cher, car la puissance de démarrage de la machine est supérieure à 400 watts. J’ai heureusement eu la chance de le découvrir avant de griller un autre appareil coûteux.
Avant de Vous Lancer
Il y a plusieurs choses à garder en tête avant de décider d’installer un système solaire photovoltaïque low-tech :
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Vous avez besoin de suffisamment de soleil. Les panneaux solaires sur les balcons ou les rebords de fenêtres ne fonctionneront pas partout. Un système similaire au mien, mais 1 000 km plus au nord, ne produirait en moyenne que la moitié de l’electricité, avec une bien plus grande différence entre l’hiver et l’été.
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Vous avez besoin de la bonne exposition. Même si vous vivez dans un climat ensoleillé, n’envisagez pas de récolter l’énergie solaire si les fenêtres ou les balcons sont orientés au nord, au nord-ouest ou au nord-est. L’ombre portée des bâtiments voisins ou des arbres sur vos panneaux peut également limiter vos ambitions. Vous avez besoin d’au moins 4 heures d’ensoleillement direct sur les panneaux chaque jour.
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Vous devez être prêt à réduire votre consommation d’énergie. Peu de personne vivant en appartement auront suffisamment d’espace disponible pour générer assez d’énergie solaire pour un mode de vie énergivore.
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Il pourrait être impossible de fermer certaines fenêtres complètement. Les cables provenant des panneaux entrent dans mon appartement en ouvrant légèrement la fenêtre coulissante du bureau. En hiver, je couvre cette ouverture avec du liège. Je n’utilise pas de chauffage, donc aucune énergie n’est perdue, mais cela pourrait être problématique dans d’autres situations. Vous n’êtes probablement pas supposé percer un trou à travers la fenêtre ou le mur si vous êtes locataire.
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Alimenter votre appartement à l’énergie solaire ne le rend pas « 100% durable ». Les énergies fossiles sont utilisées pour produire les panneaux solaires et les batteries. L’électricité que je produis est probablement plus consommatrice de CO2 par kWh que l’electricité du réseau espagnol, d’autant plus que mes panneaux et mes batteries sont fabriqués en Chine. La seule raison pour laquelle mon système est plus durablement écologique que l’utilisation de l’électricité du réseau est qu’il m’oblige à réduire considérablement ma consommation d’énergie.