ARTICLE
- La forte puissance requise pour la cuisson
- Comment adapter un appareil de cuisson électrique à l’énergie solaire ?
- Les avantages de la cuisson électrique solaire
- Notre choix de matériaux : carreaux, liège, mortier
- Fabriquer sa résistance thermique électrique
- Comment utiliser le cuiseur électrique solaire ?
- Autres modèles de cuiseurs
PROCESSUS DE CONSTRUCTION ÉTAPE PAR ÉTAPE
- Ce dont vous avez besoin : matériel et outils
- Étape 1 : construire la structure.
- Étape 2 : fabriquer la résistance thermique électrique.
- Étape 3 : ajouter l’isolation, créer le stockage thermique et intégrer la résistance électrique.
- Étape 4 : fixer la chambre de cuisson et ajouter le reste de l’isolation.
- Étape 5 : les finitions.
- Crédits
La forte puissance requise pour la cuisson
Les appareils de cuisson électriques sont difficiles à utiliser sur un système photovoltaïque solaire hors réseau. Par exemple, un four électrique nécessite entre 1 000 et 5 000 W de puissance, tandis que les brûleurs d’une cuisinière électrique consomment en moyenne entre 1 000 et 3 000 W par brûleur. Si vous souhaitez utiliser un four et un brûleur de cuisinière électrique en même temps, vous avez besoin d’une installation solaire d’au moins 32 m2 par conditions météorologiques optimales, rien que pour cuisiner. 1
Vous pouvez régler le problème en stockant l’énergie solaire dans des batteries plomb-acide ou lithium-ion. Si ces batteries sont suffisamment puissantes, elles peuvent vous fournir temporairement une alimentation électrique supérieure à celle de votre installation solaire. Les batteries vous serviront aussi pour cuisiner après le coucher du soleil ou par mauvais temps, ce qui vous arrivera probablement. Malheureusement, les batteries représentent 70 à 90 % des coûts et de l’énergie investis dans un système solaire photovoltaïque. 2
La cuisson rend donc difficile la détachement complet d’un foyer du réseau électrique et le passage à une production d’énergie autonome, sans fumée, à petite échelle. 3 C’est le cas lorsque l’on dispose d’un petit budget et d’un espace limité pour installer des panneaux solaires photovoltaïques. Par exemple, lorsque j’ai essayé d’être hors réseau dans mon appartement à Barcelone en utilisant des panneaux solaires sur le balcon et les rebords de fenêtre, c’est surtout la cuisinière électrique qui a entravé mes efforts. 4
Comment adapter un appareil de cuisson électrique à l’énergie solaire ?
De nombreux appareils que nous utilisons aujourd’hui ont été conçus pour une époque où l’électricité produite par les combustibles fossiles était abondante. Cependant, le cuiseur que nous concevons dans ce manuel démontre que les appareils modernes peuvent être repensés pour une époque où les sources d’énergie sont intermittentes et moins concentrées, telles que l’énergie éolienne et l’énergie solaire. Notre cuiseur est alimenté par un panneau solaire de 100 W, suffisamment petit (50 × 90 cm) pour être installé sur un balcon. De plus, il fonctionne après le coucher du soleil, sans utiliser de batteries.
L’isolation thermique est la clé d’une réduction importante de consommation d’énergie d’un appareil de cuisson. Notre cuiseur solaire électrique est doté d’une isolation de 5 cm sur les six côtés. Sa consommation d’énergie est encore réduite grâce à une température de cuisson plus basse d’environ 120 °C. Il est possible de tout cuire de manière sécurisée, à des températures beaucoup plus basses que celles des appareils de cuisson modernes : la cuisson est simplement plus lente.
Notre cuiseur est alimenté par un panneau solaire de 100 W, suffisamment petit (50 × 90 cm) pour être installé sur un balcon.
La masse thermique permet de cuisiner après le coucher du soleil sans batteries. Plutôt que de stocker l’électricité produite par les panneaux solaires dans une batterie pour faire fonctionner le cuiseur la nuit, la chaleur fournie par le panneau solaire pendant la journée est stockée dans l’appareil lui-même. Comme le cuiseur conserve une température élevée au lever du soleil, il est rapidement prêt à cuire à nouveau le matin. Étant connecté à un panneau solaire, il est presque toujours préchauffé et prêt à l’emploi.
La masse thermique permet également au cuiseur de continuer à fonctionner après un temps nuageux ou de pluie. De plus, l’ouverture de la porte du cuiseur n’a pas d’incidence sur la température intérieure. La chaleur est stockée dans le mortier et les carreaux, et la température de l’air revient rapidement à la normale lorsque la porte est refermée.
Le cuiseur est chauffé par une résistance électrique que nous fabriquons nous-mêmes et qui se connecte directement au panneau solaire, sans passer par une batterie, un régulateur de charge solaire ou un régulateur de tension. Pour maximiser l’efficacité énergétique, la chambre de cuisson est dimensionnée autour d’un plateau de cuisson en métal et comporte une porte latérale. Il mesure et pèse comme un cuiseur ordinaire.
Les avantages de la cuisson électrique solaire
L’appareil que nous fabriquons dans ce manuel est connu sous le nom de « cuiseur électrique solaire isolant » ou « ISEC ». L’ISEC est une version plus récente et plus sophistiquée du « cuiseur solaire », qui est un boîtier en bois isolant surmonté d’une ou plusieurs plaques de verre transparentes. Lorsqu’un cuiseur solaire est exposé au soleil, l’intérieur de l’appareil atteint des températures suffisamment élevées pour faire bouillir de l’eau et cuire des aliments. 5
Un cuiseur électrique solaire isolant se compose également d’une boîte bien isolée sans plaque en verre sur le dessus. Il est alimenté par un panneau solaire photovoltaïque relié à un élément thermique électrique situé à l’intérieur du cuiseur. On pourrait également décrire l’ISEC comme une marmite norvégienne avec un chauffage électrique à l’intérieur. 6
Le cuiseur solaire conventionnel est un appareil très simple qui fonctionne sans électricité, ne coûte pas cher, et est facile à construire soi-même. 7 En comparaison, l’ISEC est un peu plus complexe à construire et nécessite un panneau solaire de haute technologie. Cependant, la cuisson électrique solaire présente plusieurs avantages importants qui justifient l’effort supplémentaire à fournir.
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Un cuiseur solaire électrique peut être installé dans votre cuisine. Les cuiseurs solaires conventionnels ne fonctionnent que lorsqu’ils sont exposés au soleil. C’est idéal pour les événements, les pique-niques, ou si vous avez un jardin. Cependant, pour de nombreuses personnes, il est plus pratique de l’avoir dans leur cuisine. L’ISEC rend cela possible car seul le panneau solaire doit se trouver à l’extérieur. En hiver, le fait de placer le cuiseur à l’intérieur augmente également son efficacité énergétique. Il perdra moins de chaleur à cause du vent et du froid de l’environnement.
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Un cuiseur solaire électrique peut être isolé par tous les côtés. Les cuiseurs solaires ne peuvent pas être isolés par le dessus, sinon le rayonnement solaire ne peut pas rentrer dans l’appareil. 8 En revanche, un ISEC peut être isolé par tous les côtés, ce qui le rend plus efficace sur le plan énergétique qu’un cuiseur solaire non électrique. Vous pouvez améliorer l’isolation du cuiseur en le recouvrant d’une ou plusieurs couvertures ou tapis, ce qui n’est pas possible avec un cuiseur solaire non électrique.
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Un cuiseur solaire électrique fonctionne bien par temps nuageux. Les cuiseurs solaires conventionnels ont besoin d’un ensoleillement total pour fonctionner efficacement. C’est particulièrement vrai pour les cuiseurs paraboliques, qui concentrent les rayons solaires sur un point précis. Cependant, les cuiseurs solaires ordinaires présentent également de faibles performances par temps nuageux. Mais, avec un cuiseur solaire électrique, on peut contourner ce problème en utilisant plus de panneaux solaires photovoltaïques ou bien des plus grands. Lors de journées ensoleillées, vous pouvez utiliser le surplus de capacité photovoltaïque pour faire autre chose. 2
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Un cuiseur solaire électrique est facile d’utilisation. Les cuiseurs solaires ordinaires doivent être tournés vers le soleil au moins toutes les 15 à 30 minutes ; les cuiseurs solaires paraboliques quant à eux, nécessitent des déplacements encore plus fréquents ; tandis qu’un ISEC n’a pas besoin d’être déplacé. Bien sûr, vous pouvez tourner les panneaux solaires vers le soleil toutes les 15 minutes, ce qui accélérera le chauffage de l’intérieur de l’ISEC. Toutefois, les panneaux solaires sont moins sensibles à l’orientation du soleil que les cuiseurs solaires ordinaires. Une fois que vous avez placé les aliments dans le cuiseur électrique solaire isolant, vous n’avez plus besoin de le toucher.
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Un cuiseur solaire électrique permet de cuisiner après le coucher du soleil. En intégrant l’élément thermique électrique dans un matériau à forte masse thermique, un ISEC peut rester à haute température pendant plusieurs heures après le coucher du soleil. Bien qu’il existe plusieurs méthodes pour ajouter un système de stockage de la chaleur à un cuiseur solaire conventionnel, elles sont complexes et ne fonctionnent pas très bien. Par exemple, l’ajout d’une masse thermique à un cuiseur solaire conventionnel le rendrait trop lourd pour se déplacer et suivre le soleil. Un ISEC avec stockage d’énergie thermique est également lourd, mais il peut rester statique.
Notre choix de matériaux
Low-tech Magazine n’a pas inventé l’ISEC. Nos expériences de cuiseurs électriques solaires isolants, qui ont débuté durant l’été 2024, s’inspirent des travaux réalisés à l’université Cal Poly et à Living Energy Farm 910, que nous avons décrits dans un précédent article sur l’énergie solaire directe. 2 Nous avons emprunté des idées et des connaissances aux manuels réalisés par ces pionniers, mais nous avons également constaté qu’il était possible d’apporter des améliorations, principalement dans le choix des matériaux de construction. Nous avons également appliqué le concept de cuisson solaire isolante à une cafetière DIY, pour laquelle nous publierons bientôt un manuel séparé.
Plutôt que d’utiliser de la laine de verre, de la tôle ou des seaux en plastique, nous avons choisi de concevoir notre cuiseur avec des carreaux, du liège, du plâtre, du bois et du mortier.
Plutôt que d’utiliser de la laine de verre, de la tôle ou des seaux en plastique, nous avons choisi de concevoir notre cuiseur avec des carreaux, du liège, du plâtre, du bois et du mortier. Ces matériaux sont plus faciles à se procurer et à manipuler, et leur aspect est également plus esthétique. Notre objectif était de concevoir un appareil qu’on ait envie d’avoir dans sa cuisine ; un objet pratique, esthétique, et que l’on puisse fabriquer ou réparer avec des outils courants. Il reste à vérifier la durabilité de ces matériaux sur le long terme. Cependant, après plusieurs mois d’utilisation intensive, le cuiseur ne montre encore aucun signe d’usure significative.
Notre cuiseur solaire électrique repose sur plusieurs éléments essentiels : une structure en bois, un élément chauffant électrique en fil de nichrome, une isolation en liège, une masse thermique en mortier et en carreaux et un panneau solaire photovoltaïque.
Les carreaux de céramique et de terre cuite
L’usage des carreaux est la caractéristique distinctive de notre design. La plupart des ISEC (cuiseurs solaires électriques isolés) utilisent l’aluminium pour la chambre de cuisson, et du métal ou du plastique (souvent un seau) pour l’extérieur. Cependant, fabriquer un caisson étanche en aluminium demande du matériel spécialisé, et le plastique, en plus d’un aspect peu esthétique, peut devenir cassant avec le temps.
L’usage des carreaux est la caractéristique distinctive de notre design.
Dans notre cuiseur, la chambre de cuisson est constituée de carreaux épais en terre cuite, offrant une surface intérieure étanche, ignifuge et facile à nettoyer. Les carreaux empêchent l’eau de pénétrer dans la couche d’isolation ou dans le système électrique, et ils garantissent que l’isolant ne soit pas endommagé par la chaleur. 11 Nous avons également recouvert l’extérieur du cuiseur de carreaux : ils apportent une touche esthétique, protègent de l’eau et facilitent le nettoyage.
Les carreaux sont bon marché et faciles à trouver : nous avons ramassé les nôtres dans les rues de Barcelone. Leur pose demande peu d’outils et de compétences. Un coupe-carreaux peut être utile, mais on peut aussi éviter cette étape en choisissant les bons formats ou en adoptant la technique du « trencadís », popularisée par Antoni Gaudí, qui consiste à briser les carreaux et à les réassembler en mosaïque.
L’utilisation d’un coupe-carreaux demande un peu d’entraînement et il est normal d’en casser quelques-uns au début. Tracez un sillon sur le carreau en passant plusieurs fois la roue en tungstène, puis exercez une pression des deux côtés avec les mains : le carreau devrait se rompre le long de cette ligne. Certains carreaux sont plus difficiles à couper que d’autres. Pour coller les carreaux sur du bois, utilisez un mortier-colle à base de ciment. Sur du liège, il vaut mieux appliquer d’abord une couche de bandes de plâtre, car le mortier n’y adhère pas bien. Enfin, utilisez du coulis pour sceller les joints entre les carreaux.
Le liège (ou la laine) pour l’isolation
L’isolation est le cœur de tout cuiseur solaire, et l’ISEC ne fait pas exception. C’est elle qui permet de cuisiner avec un tout petit panneau solaire : la chaleur s’accumule progressivement, car l’isolation ralentit sa dispersion vers l’extérieur. Pour l’isolation, nous avons appliqué une couche de 5 cm de liège expansé sur les six faces de l’appareil. Ce matériau naturel, issu des déchets de liège et aggloméré à la vapeur, possède d’excellentes propriétés isolantes. Les plaques de liège classiques fonctionnent également très bien.
Pour l’isolation, nous avons appliqué une couche de 5 cm de liège expansé sur les six faces de l’appareil.
Le liège peut être coûteux et difficile à trouver. Une alternative plus économique consiste à découper de vieux vêtements ou couvertures en laine : le résultat est tout aussi isolant, mais demande plus de travail. Outre le liège et la laine, d’autres matériaux isolants existent, mais beaucoup sont toxiques, désagréables à manipuler, ou inflammables. Le coton et la cellulose, issus de déchets, sont des options durables et bon marché, mais leur performance reste inférieure à celle du liège ou de la laine.
Le mortier comme réserve de chaleur
La base de notre cuiseur est en mortier, un matériau capable d’emmagasiner une grande quantité de chaleur. Cette masse thermique permet de continuer à cuire après le coucher du soleil. Le panneau solaire emmagasine la chaleur dans le cuiseur plutôt que de la transformer en électricité pour batterie. Le mortier remplit un double rôle : il stocke la chaleur et protège en toute sécurité l’élément chauffant électrique (voir ci-dessous). Tous les ISEC avec un élément chauffant fabriqué maison possèdent une certaine masse thermique, mais nous avons choisi d’épaissir la dalle pour améliorer le stockage de chaleur. Les carreaux de la chambre de cuisson contribuent également à cette masse thermique supplémentaire.
Le panneau solaire emmagasine la chaleur dans le cuiseur plutôt que de la transformer en électricité pour batterie.
Le mortier se compose de ciment, de sable et d’eau. Il est vendu sous forme de poudre dans des sacs, à mélanger avec de l’eau avant utilisation. Vous pouvez également préparer votre propre mortier en mélangeant du ciment, du sable et de l’eau. Suivez les indications figurant sur l’emballage pour respecter les bonnes proportions. Laissez sécher plusieurs jours : une fois durci, le mortier devient solide et résistant. L’usage de ciment réfractaire n’est pas requis : ce type de matériau est conçu pour résister aux températures très élevées des cheminées ou des fours à pizza, car la chaleur dégagée par le cuiseur reste bien inférieure. Le sable est une autre option présentant une bonne capacité de stockage thermique.
Élément chauffant et système électrique
Notre cuiseur est équipé d’une résistance électrique directement reliée au panneau solaire. Lors de nos premiers prototypes, nous avons utilisé des résistances commerciales, mais les résultats ont été décevants. Nous avons donc décidé de fabriquer notre propre élément chauffant, en suivant le guide fourni par Living Energy Farm. 12 Fabriquer sa propre résistance demande un peu plus de travail, mais cela en vaut la peine.
Les résistances commerciales comportent souvent un thermostat intégré, ce qui complique le réglage de la température à l’intérieur du cuiseur. Elles nécessitent également une tension d’alimentation qui ne correspond pas à celle délivrée par la plupart des panneaux solaires, obligeant à ajouter un composant électronique supplémentaire (un convertisseur Buck). Les fixer solidement s’est aussi avéré difficile, et protéger le système électrique de l’humidité a posé problème, jusqu’à provoquer un début d’incendie dans un prototype.
Fabriquer sa propre résistance demande un peu plus de travail, mais cela en vaut la peine.
En intégrant la résistance faite maison dans une base de mortier, nous avons résolu tous ces problèmes. Cette résistance est constituée d’un circuit en fil de nichrome (alliage de nickel et de chrome). La longueur et le diamètre du fil de nichrome déterminent la chaleur produite et sa dissipation, ce qui permet d’adapter précisément le circuit à la tension et au courant fournis par le panneau solaire. Le circuit se relie aux câbles du panneau via un court tronçon de câble résistant à la chaleur (voir notre manuel).
Notre cuiseur est également équipé d’un fusible thermique et d’un thermostat intégrés dans la couche de mortier. Ces dispositifs ne sont cependant pas indispensables lorsque le cuiseur fonctionne directement sur le panneau solaire sans batterie : la régulation se fait naturellement. Dès que le soleil se couche, la résistance cesse de chauffer, empêchant toute surchauffe.
Utilisation du cuiseur solaire électrique
Cet appareil permet de cuire des aliments crus (légumes, céréales, viandes ou poissons), mais peut également servir à réchauffer des plats préparés, un peu comme un micro-ondes (lent).
Sécurité alimentaire
Le cuiseur atteint une température maximale d’environ 120 °C. Pour éviter tout risque de contamination bactérienne, les aliments doivent être réfrigérés ou chauffés à une température minimale comprise entre 58 °C et 74 °C selon le type d’aliment, pendant au moins 15 secondes : Légumes et fruits cuits : 58 °C Viandes et poissons : 63 °C Viandes hachées : 71 °C Restes et volaille : 74 °C La température des aliments se mesure avec un thermomètre, que l’on introduit par la cheminée du cuiseur.
Il faut garder à l’esprit que la température chute dès l’introduction des aliments. Les aliments congelés sont particulièrement déconseillés, car la chaleur peut baisser fortement et il faudra plusieurs heures pour atteindre de nouveau une température de sécurité. Le cuiseur doit donc être préchauffé avant utilisation. Toutefois, grâce à son alimentation par panneau solaire, le cuiseur conserve la plupart du temps une chaleur suffisante. Il n’est pas recommandé de laisser des aliments dans le cuiseur toute la nuit, sauf si l’on est certain que la température de sécurité soit maintenue jusqu’au matin (ce qui n’est pas le cas de notre modèle).
Le temps de cuisson
Il est tout à fait possible de construire un cuiseur électrique solaire isolé, qui cuit les aliments aussi rapidement qu’un cuiseur normal (voir plus loin). Cependant, construire une « mijoteuse » isolée à basse température a du sens, et ce pour trois raisons. Premièrement, elle vous permet de cuisiner avec un panneau solaire plus petit. Deuxièmement, les aliments cuits lentement ont meilleur goût et conservent davantage de nutriments. Troisièmement, à des températures de cuisson plus basses, les aliments ne peuvent pas brûler et il n’est donc pas nécessaire de les remuer. Même si le temps de cuisson est plus long, le processus de cuisson est malgré tout plus calme et plus simple.
En moyenne, il faut environ deux fois plus de temps pour faire cuire les aliments qu’avec un cuiseur traditionnel. La plupart des repas que nous préparons, en cuisinant des aliments crus, prennent entre deux et quatre heures de préparation. Faire chauffer des restes ou un plat préparé prend environ une heure. Ces durées ont été relevées dans des conditions météorologiques optimales et avec un cuiseur préchauffé.
Cuisiner après le coucher du soleil
En raison de la masse thermique élevée du cuiseur, il aura besoin de plusieurs heures pour chauffer lorsque vous le connecterez pour la première fois à un panneau solaire. Cependant, à partir du deuxième jour, le panneau solaire maintiendra le cuiseur à une température élevée en permanence, et ce pendant de nombreuses heures après le coucher du soleil. Lorsqu’il est complètement chargé au coucher du soleil et qu’il atteint une température d’environ 120 °C, notre cuiseur électrique maintient une température suffisamment élevée pour cuire pendant 4 à 5 heures. Une fois que la nourriture est dans le cuiseur, la température baisse mais reste suffisamment élevée (au dessus de 80 °C) pour cuire les aliments en toute sécurité. La chaleur accumulée pendant la nuit nous permet de relancer rapidement la cuisson le matin. En effet, notre cuiseur sera encore au-dessus de 40 ou 50 °C au lever du soleil.
La chaleur conservée à la fin de la nuit nous permet de relancer rapidement la cuisson le matin.
Étendre une ou plusieurs couvertures de laine sur le cuiseur au coucher du soleil permet de conserver davantage la chaleur, ce qui permet de cuisiner un repas encore plus tard dans la soirée ou de commencer à cuisiner encore plus tôt le lendemain. Vous pouvez également utiliser des couvertures pour augmenter l’efficacité énergétique du cuiseur pendant la journée, pour obtenir une température de cuisson plus élevée.
L’humidité
Selon les aliments que vous préparez, une humidité excessive à l’intérieur de la chambre de cuisson peut devenir un problème. L’eau contenue dans les aliments peut s’évaporer et s’accumuler dans le cuiseur. C’est pourquoi notre cuiseur est équipé d’une petite cheminée par laquelle l’humidité peut s’échapper. Il peut être fermé par un bouchon de liège si vous souhaitez conserver l’humidité à l’intérieur. Il est conseillé de laisser la porte du cuiseur ouverte de temps en temps afin que l’humidité présente dans la couche d’isolation puisse s’évaporer.
Différents modèles de cuiseurs
Comme nous avons conçu notre cuiseur autour d’une plaque de cuisson, ce cuiseur convient surtout pour les plats à cuire au four. Cependant, d’autres modèles existent. Un ancien prototype que nous avions construit possède une chambre thermique de la taille d’une cocotte : il est donc plus adapté à la préparation de ragoûts et de soupes. Quelle que soit la forme que vous choisissez, il est toujours préférable de dimensionner votre cuiseur en fonction des proportions d’un récipient spécifique. Si vous placez une petite casserole dans une grande chambre de cuisson, vous gaspillerez une grande quantité d’énergie pour chauffer l’espace vide.
Une isolation plus épaisse
Plus la couche d’isolation est épaisse, moins le cuiseur ne consomme d’énergie. Une isolation plus épaisse permet d’utiliser un panneau solaire plus petit, et ce, pour le même temps de cuisson, ou de réduire le temps de cuisson avec le même panneau solaire. Une isolation plus épaisse améliorera permet également de mieux conserver la chaleur. Cependant, n’oubliez pas que cela augmentera le volume de l’appareil de façon exponentielle. Épaissir l’isolation de 5 cm sur les six côtés aurait agrandi la taille de notre cuiseur, ce qui aurait été peu pratique pour la plupart des cuisines.
Une température de cuisson plus élevée
Si vous voulez un cuiseur électrique solaire qui cuit les aliments plus rapidement, à une température plus élevée, vous devriez choisir un panneau solaire plus grand et un élément chauffant plus puissant. Vous devriez aussi augmenter le réglage du thermostat et du fusible thermique. L’ajout d’une isolation supplémentaire accélère également le temps de cuisson. Cependant, notez que nous n’avons pas testé nos matériaux de construction avec des températures plus élevées ; si vous choisissez d’utiliser ce cuiseur dans ces conditions, vous agissez à vos risques et périls.
Tout dépend en grande partie des coutumes locales liées aux heures de repas, en particulier le dîner. Par exemple, l’heure du dîner en Europe se situe entre 17 et 19 heures dans les pays nordiques, et entre 21 et 23 heures, pour les pays plus au sud. Puisque dans le Nord, les heures de dîner sont plus tôt que dans les pays du Sud, elles s’accordent avec l’utilisation de l’énergie solaire pour cuisiner. Cependant, l’heure de dîner plus tardive dans le Sud nécessiterait un cuiseur plus puissant permettant d’avoir une température plus élevée et capable de mieux conserver la température, afin de cuisiner après le coucher du soleil, ou pour garder un plat chaud préparé le matin.
Une conservation de la chaleur plus ou moins importante
Même si un cuiseur solaire électrique a toujours besoin d’une isolation, vous pouvez la faire avec peu, voire pas de masse thermique. Votre choix d’isolation dépend de la façon dont vous souhaitez utiliser l’appareil. Avec une masse thermique faible voire nulle, l’appareil de cuisson va chauffer et refroidir assez vite, et sera un peu plus léger. En revanche, vous ne pourrez pas l’utiliser pour cuisiner après le coucher du soleil. Beaucoup d’ISEC faits par d’autres constructeurs fonctionnent de cette manière.
D’autre part, il est aussi possible de faire une version plus grande de notre cuiseur solaire qui peut être utilisée pour cuisiner toute la journée. Pour ce faire, ajoutez davantage de masse thermique, d’isolation, et envisagez d’avoir une température plus élevée pour votre cuiseur. Il faudrait aussi utiliser un panneau solaire plus grand et une résistance électrique plus puissante. Un tel appareil de cuisson serait toujours immédiatement prêt à l’emploi. Il n’y aurait pas besoin de stocker de l’électricité. Il pourrait être utilisé dans les cuisines industrielles ou en tant qu’appareil de cuisson communautaire.
Vous pourriez également construire un cuiseur électrique solaire avec un accumulateur thermique en métal plutôt qu’en mortier. Il ne permet pas de cuisiner après le coucher du soleil, mais il permet d’atteindre des températures de cuisson plus élevées pendant une courte durée. Cela permet ainsi de cuire et de frire des aliments.
Guide de construction étape par étape
Ce dont vous avez besoin
Des ustensiles de cuisine
- Une plaque de cuisson pour mettre les aliments à cuire dans le cuiseur. Cette plaque peut être en métal, en céramique ou en verre résistant à la chaleur. Elle est indispensable et doit être choisie en priorité car vous devrez vous servir de ses dimensions pour construire votre cuiseur.
Un élément chauffant électrique et un système électrique (voir notre autre manuel)
- Un panneau solaire de 100 W.
- Du fil de nichrome.
- Un câble électrique résistant à la chaleur.
- Un interrupteur thermique.
- Un fusible thermique.
Des matériaux de construction
- Des planches en bois. Le cuiseur est construit autour d’une structure en bois. Vous pouvez réutiliser une boîte existante ou la fabriquer de toutes pièces. Du bois de récupération ou des panneaux aggloméré conviennent parfaitement, puisqu’ils ne seront pas visibles.
- Du carrelage. Nous utilisons du carrelage pour l’intérieur de la chambre de cuisson et l’extérieur du cuiseur.
- Des vis à bois.
- Des charnières et des crochets. Pour fixer la porte du cuiseur.
- Des pieds pour le cuiseur. Nous les avons fabriqués en bois. Les pieds permettent de soulever et déplacer le cuiseur et le protègent contre les dégâts causés par l’eau, qui pourrait s’infiltrer par le dessous de l’appareil.
- La poignée de la porte du cuiseur. Nous l’avons aussi fabriquée en bois.
Des matériaux d’isolation
- Des panneaux de liège expansé. Nous avons utilisé des panneaux de liège expansé de 5 cm d’épaisseur pour isoler l’ensemble des côtés du cuiseur. Nous avons également utilisé environ 1,20 m de liège expansé. Vous pouvez aussi utiliser de l’isolant ordinaire en liège ou en laine. Évitez les matériaux inflammables comme le coton, les copeaux de bois ou tout matériau isolant à base d’huile. Le liège et la laine sont des matériaux résistants au feu.
- De fines plaques de liège (4 mm). Elles servent de joint d’étanchéité entre la porte du cuiseur et l’armature. Elles sont également utilisées pour combler les différences de hauteur entre les couches de liège expansé au-dessus de la chambre de cuisson.
De la matière pour stocker la chaleur
- Du mortier de construction. Nous utilisons du mortier pour fournir une masse thermique afin de conserver la chaleur et intégrer le chauffage à résistance électrique.
Des matériaux de fixation et de remplissage
- Du mortier adhésif. Pour fixer le carrelage sur les surfaces en bois et en liège.
- De quoi faire des joints. Pour faire les joints de carrelage.
Les pièces supplémentaires
- Un thermomètre de cuisine. Il vous en faudra un équipé d’une longue sonde, car il devra traverser l’épaisse couche d’isolation en haut de l’appareil pour pouvoir atteindre les aliments.
- Un conduit de cheminée. Faites un tube avec une fine feuille d’aluminium, que vous pouvez découper à partir d’une canette de soda. Sinon, vous pouvez acheter un tube métallique de la bonne taille.
Les outils
- Un tournevis
- Une scie à bois
- Une perceuse (vous avez besoin d’un foret à béton pour l’ouverture de la cheminée)
- Un fer à souder et du fil d’étain
- Un coupe-carreaux (seulement si vous devez retailler les carreaux)
- Des outils de mesure
- Un cutter
- Une truelle à mortier et un récipient de mélange
Étape 1 : Construire la structure
- Se procurer une plaque de cuisson et la mesurer. Nous avons dimensionné notre appareil de cuisson autour d’un plateau en acier inoxydable qui fait à peu près la même taille qu’une feuille A4 : 20 cm x 27 cm.
- fig 1 - À l’aide de carreaux, créez une boîte autour du plateau avec suffisamment d’espace pour pouvoir y glisser et en sortir vos aliments facilement. La boîte deviendra la chambre intérieure du cuiseur solaire. Pour l’instant, faites tenir la structure avec du ruban adhésif. Lorsque vous mesurez les dimensions de la chambre thermique, laissez un espace au dessus de la plaque de cuisson pour permettre à la chaleur de circuler. L’idéal est de trouver du carrelage à la bonne dimension. Sinon, coupez les carreaux à la bonne taille à l’aide d’un coupe-carreaux.
- Mesurez les dimensions extérieures de la chambre de cuisson carrelée pour calculer celles de la boîte en bois qui l’entourera. Laissez 5 cm supplémentaires sur les six côtés pour pouvoir mettre la couche de liège expansé. Au fond, prévoyez 2 à 3 cm en plus pour tenir compte du mortier, qui enrobera l’élément chauffant. Ajoutez 5 mm supplémentaires de tous les côtés afin que tout s’emboîte.
- fig 2 - Construire la boîte en bois selon les dimensions calculées (ne pas oublier de prendre en compte l’épaisseur du bois). Vissez les éléments en bois pour que la partie supérieure puisse être retirée ultérieurement dans le processus de construction (voir l’étape 3). Avant de commencer à couper le bois, prenez le temps de tout mesurer plusieurs fois, car il est facile de faire des erreurs.
- fig 2-3. - Pour que la porte s’aligne parfaitement avec le reste de la boîte en bois, construisez d’abord la structure dans son ensemble, puis séparez la partie qui servira de porte, à la scie. La partie qui servira de porte doit avoir une profondeur de 6 cm pour s’insérer dans la couche de liège isolante et le carrelage de la chambre de cuisson, sur ce côté.
- fig 4 - Une fois le bois coupé, dévissez la planche supérieure afin d’avoir un meilleur accès à l’intérieur.
Étape 2 : Faire une résistance électrique à la chaleur
- Créer un élément chauffant résistif à l’aide d’un fil de Nichrome. Voir notre manuel séparé pour les instructions.
Étape 3 : Ajouter l’isolation, créer la masse thermique et ajouter la résistance électrique
- fig 5 - À l’aide d’une scie fine ou d’un cutter, découpez et collez les panneaux de liège expansé pour couvrir tous les côtés de la zone. Vous pouvez utiliser de la colle à bois ou de la colle chaude. Gardez la planche supérieure à l’écart pour l’ajouter plus tard.
- fig. 6 - Mélangez un peu de mortier de construction avec de l’eau et créez une couche d’environ 10-15 mm par-dessus la couche de liège inférieure. Laissez poser pendant quelques heures.
- fig 6 - Percez un trou à travers le liège et le bois à l’arrière de la boîte, à environ 10 mm au-dessus de la couche de mortier, pour y faire passer les câbles électriques.
- fig 7 - Placez le circuit de résistance sur le lit de mortier et faites passer les extrémités du câble résistant à la chaleur par le trou situé à l’arrière de la boîte. Veillez à ce que les fils de nichrome ne se croisent et ne se touchent pas, et que le fusible (optionnel) ainsi que l’interrupteur thermique (optionnel) soient également posés sur le mortier.
- fig 8 - Coulez encore 10 à 15 mm de mortier pour recouvrir le circuit.
Étape 4 : Mettre en place la chambre de cuisson et finir l’isolation
- fig 9 - Prenez le carrelage que vous aviez préparé pour la chambre intérieure. Placez un peu de mortier à l’arrière des dalles inférieures et pressez-les sur le lit de mortier.
- fig 10. - À l’aide de mortier adhésif, fixez les carreaux restants sur les côtés ainsi qu’à l’arrière des panneaux de liège, afin de recréer la chambre de cuisson que vous aviez collée à l’étape 1.
- fig 11. - À l’aide d’une perceuse munie d’une mèche à béton, percez un trou de 10 à 12 mm dans le carreau supérieur central pour y placer un conduit d’aération.
- fig 11. - Posez les dalles supérieures restantes sur les bords des carreaux latérales en y ajoutant un peu plus de mortier. Il est conseillé d’incliner légèrement les carreaux supérieurs d’un côté pour diriger la condensation loin de la plaque de cuisson.
- fig 12. - Avant de remettre le panneau de liège supérieur sur la chambre intérieure carrelée, marquez la position du conduit d’aération et percez les panneaux de liège et les planches de bois.
- fig 12-13. - Placez le panneau de liège supérieur sur les carreaux du dessus avec un peu de mortier adhésif, puis revissez la planche en bois supérieure pour fermer la boîte. S’il y a des trous d’air, comblez-les avec des morceaux ou plaques de liège pour éviter toute fuite de chaleur.
- fig 14. - Collez des fines plaques de liège de 4 mm d’épaisseur sur le caisson d’isolation qui entoure l’avant de la chambre de cuisson. Utilisez de la colle à bois. Cette couche supplémentaire permet de fermer hermétiquement la porte et d’empêcher la chaleur de s’échapper.
- fig 15 - Isolez la porte en fixant un panneau de liège expansé de 5 cm avec de la colle à bois à l’intérieur. Avec du mortier adhésif, placez le dernier carreau sur la porte en veillant à ce qu’il s’aligne correctement et ferme la chambre intérieure lorsque la boîte en bois est fermée.
- fig 16. - Collez une autre fine plaque de liège de 4 mm de manière à reproduire le bord de la chambre.
La boîte est presque terminée. Laissez le tout sécher et se solidifier pendant au moins 48 heures.
Étape 5 : Touches finales
- fig 17 - Carreler le dessus de la boîte pour la rendre étanche et résistante à la chaleur (on peut y mettre la plaque de cuisson à la sortie du cuiseur). Veillez à faire un trou pour le conduit d’aération.
- Fabriquez et insérez le conduit. Insérez-le dans le trou que vous aviez fait.
- Faire les joints. Scellez la chambre intérieure carrelée avec du mortier pour éviter que l’isolation en liège ne prenne l’humidité. Faites de même pour les carreaux extérieurs et pour le joint du conduit d’aération. Nous avons également ajouté du plâtre sur les côtés pour protéger le bois.
- fig 18. - Ajouter une poignée à la porte.
- fig 19 - Ajouter des charnières pour visser la porte à l’armature du cuiseur. Placez un loquet métallique de chaque côté pour verrouiller hermétiquement la porte pendant le fonctionnement.
- Ajoutez des petits pieds au cuiseur permet de le soulever plus facilement et de le protéger contre les dégâts d’eau.
- Le cuiseur est terminé !
- Reliez les câbles résistants à la chaleur qui sortent du cuiseur aux fils du panneau solaire. Insérez un interrupteur entre les deux (branchez-le sur le fil positif).
Crédits
- Concept : Kris De Decker, avec la contribution de Marie Verdeil.
- Conception : Marie Verdeil, avec la participation d’Anna Mareschal de Charentenay.
- Construction et documentation : Marie Verdeil, avec l’aide de Hugo Lopez.
- Conception et construction de deux prototypes antérieurs : Vaiva Vinskaité, avec la participation de Kris De Decker et Marie Verdeil.
- Remerciements : Samira Allaouat et Alexandra Tollefsrud pour le carrelage. Akasha Hub Barcelone pour l’espace de travail. Living Energy Farm et Cal Poly pour leurs avancées sur les cuiseurs électriques solaires isolés.